Olivia Paroldi
« Je dessine d’après des rencontres qui ont fait résonner ma sensibilité. Mes estampes cherchent à capter et à poser la lumière sur certaines émotions partagées, elles vagabondent jusqu’à atteindre graphiquement un état poétique qui traduit le silence de certaines vies. »
Née à Paris en 1981, formée aux arts appliqués et diplômée de l’école Estienne, Olivia Paroldi s’est spécialisée dans la gravure et l’illustration. Des années de pratique en lien avec les métiers du livre lui ont d’abord permis de mettre son talent au service de la transmission et de la pédagogie. Ses illustrations pour des supports éducatifs et son travail de gravure en relief pour l’apprentissage des jeunes malvoyants l’ont sensibilisée à l’univers de l’enfant et son imaginaire poétique. Des rencontres et expériences qui ont conforté sa manière profondément humaniste d’être au monde et sa démarche artistique : mettre en lumière les invisibles, pour en dévoiler la beauté, avec pudeur et délicatesse. Prenant son envol comme artiste, Olivia Paroldi a tourné son regard vers l’Autre fragile et vulnérable. C’est par des séries d’estampes qu’elle va tracer un cheminement créatif qui lui ressemble : son œuvre est empreinte d’une douceur et d’une bienveillance infinies. Depuis une dizaine d’années, elle apporte des éclats précieux dans les rues des villes : ses « estampes urbaines » en collages surgissent comme des moments de grâce pour les promeneurs qui savent ouvrir les yeux. Ce sont des rencontres avec des belles âmes dont l’artiste a dessiné les traits avec la légèreté d’une poésie. Les estampes collées sur les lieux de passage sont aussi discrètes que les invisibles qu’elle représentent. Le vent et la pluie vont faire leur œuvre, révéler les fragments d’une beauté éphémère et précieuse comme la mémoire d’un visage et d’une histoire. La dichromie bleutée de la gravure va s’estomper au fil des jours, tissant un fil entre la présence et l’absence. Le rapport au temps mémoriel qui marque l’œuvre d’Olivia Paroldi tient aussi à cette technique ancestrale qu’elle met au service de questionnements contemporains. Pour l’artiste, qui ne veut pas s’imposer en s’appropriant l’espace public, ces estampes de rues sont de petites vies de papier, une invitation à laisser effleurer nos imaginaires. Et au-delà de l’émotion esthétique singulière qui peut nous transporter lors de la contemplation de ces collages qui racontent une histoire, c’est aussi l’humanisme qui émane du projet artistique qui nous donne à interroger le monde. Différentes séries d’estampes sont venues et des engagements de l’artiste portés vers la protection de l’enfant et l’accueil des vies en marge.
La série de collages « Les enfants de l’exil » inscrit la tragédie qui se joue en Méditerranée de ces enfants migrants qui tentent la traversée du désespoir à l’espoir. Les estampes, réalisées comme des mises en scène métaphoriques à partir de visages repérés par l’artiste sur des photos d’archives ou d’actualité et des films documentaires, sont collées dans des lieux de passage emblématiques (gares, ports, postes-frontière…). La série « Des bateaux de papier » illustre, dans le même esprit, la manière poétique avec laquelle un enfant se raconte une traversée en mer. Dans les Balkans, l’artiste a aussi rendu visible les regards des réfugiés qui sillonnent l’Europe en quête d’un accueil bienveillant. Pour la série « Mauvaises graines », Olivia Paroldi est allée à la rencontre des enfants des bidonvilles, pour confier à nos regards la beauté qui émane des leurs. Elle s’est imaginé les baraquements et abris de fortune comme autant de plantes qui poussent et deviennent les refuges d’ « enfants-papillons » dont elle a déploie, à travers ses collages, les ailes d’une grâce éphémère. Des rencontres et des échanges qui n’ont pas laissé l’artiste indemne, et qui convoquent notre humanité. Un projet artistique s’ouvre sur la question des enfants des plantations de cacao, pour ne pas oublier que la gourmandise des uns a parfois, à l’autre bout du monde, un arrière-goût amer pour les autres. Enfin c’est aussi aux femmes que l’artiste rend hommage dans sa série « Mémorables oubliées » qui met à l’honneur des figures féminines engagées du monde entier, qui n’ont pas été portées sur la scène médiatique et qui pourtant ont œuvré, chacune à leur manière, à rendre ce monde meilleur. L’infinie délicatesse des gravures d’Olivia Paroldi et la douceur qui se dégage du visage de l’Autre rendu visible est un écho sublime à l’œuvre du philosophe Emmanuel Levinas pour qui le visage est ce surgissement de l’altérité personnifiée qui engage chacun dans une éthique de responsabilité. Olivia Paroldi a participé à de nombreuses expositions collectives et a également présenté son travail en solo show dans différentes galeries ou festivals en Méditerranée où elle réside, à Paris, au Mexique. En atelier et à destination des galeries, elle a réalisé une série d’eaux-fortes ainsi que des pièces qui reprennent des fragments de ces estampes urbaines sur des supports trouvés dans les rues. Olivia Paroldi est de ces artistes qui nous ouvrent les yeux pour croiser le sublime dans le regard de l’Autre, de ces artistes pour qui la grâce nous civilise, pour qui la beauté est un humanisme.