Depuis deux ans Hatchikian Gallery a développé un partenariat avec Quai 36 pour présenter des artistes travaillant à la fois en espace public pour des réalisations murales et en atelier sur toiles ou différents supports. Cette dualité nourrit l’élan de pratiques qui associent fulgurance créative et recherche esthétique, pour le déploiement de trajectoires singulières qui ont pu s’imposer sur la scène artistique contemporaine. Pour fêter les deux ans de succès de ce ce partenariat qui a mis en lumière des talents émergents issus de l’art urbain, Hatchikian Gallery et Quai 36 présentent un group show qui réunit la diversité des propos visuels des artistes exposés au cours de ces dernières saisons dans le cadre de cette perspective croisée entre le regard d’une galeriste et celui de producteurs d’art pour les lieux en transition. Audrey Hatchikian et Julie Frydman proposent une scénographie dynamique qui associe les univers hétéroclites des artistes qui ont ponctué deux années de rencontres et d’événements : un accrochage inédit rythmera la confrontation entre les gimmicks graphiques facétieux de David Bruce, les architectures oniriques inspirantes de Chazme, les colorimétries organiques de Nelio, les abstractions captivantes de Yann L’Outsider, les géométries vibrantes de Simon Poter, les calligraphies humanistes de Zepha et la chromatique magnétique des éléments de Zabala.
En esthète inlassable, Pol Quadens dessine les traits d’un monde où la “marchandise”, fétiche de la laideur transactionnelle, se serait soustraite, évincée par la beauté de l’objet. Comme Kant l’écrivait pour poser les limites d’une marchandisation extensive, “Tout a ou bien un prix ou bien une dignité”, Pol Quadens dirait peut-être “ou bien un prix ou bien une beauté”. Sublimer la matière est un élan qui lui vient de l’enfance, une manière de s’inscrire au monde, devenir homme, dans la transmission d’une fierté à concevoir et fabriquer de beaux objets irréductibles à leur fonction. Né en 1960 à Bruxelles, il déploie une œuvre dont l’aboutissement réconcilie le design et l’art.
En se retournant sur une décennie de création depuis sa transition du mur à la toile pour publier la monographie Variation(s), Yann L’Outsider a dû éprouver un vertige, et ce vertige le spectateur s’y confronte aussi lorsqu’il plonge son regard dans l’abstraction duale de ses œuvres où les surgissements de lumière projetée dans les interstices de matière noire entraînent vers d’insondables infinis… Au fil des séries en noir et blanc qui ont marqué ces dix dernières années, Yann L’Outsider a inlassablement exploré les possibles de la forme dans le langage visuel de l’abstraction : une esthétique de la lettre, au prisme de jeux typographiques, qui prolonge en atelier sa pratique urbaine originelle, mais aussi une esthétique de la forme en mouvement. Des variations au pluriel, que l’artiste cherche à saisir, non pas dans des instantanés en suspens mais précisément dans leurs dynamiques de transformation, et c’est bien une vibration singulière qui émane de ses œuvres, créant une tension dans laquelle nous sommes, spectateurs, littéralement happés.
Pour les amateurs d’art, les destinations offrant à la fois un environnement exceptionnel et des musées à ciel ouvert sont un véritable enchantement d’esthète en quête d’escapades à la rencontre d’œuvres et d’architectures spectaculaires. De la provence toute proche aux îles japonaises lointaines, partons visiter deux domaines qui se sont imposés comme des escales artistiques incontournables : le Château La Coste, domaine viticole sur les contreforts du Luberon, et Naoshima, île de la mer intérieure de Seto au Japon. Le lien entre les deux ? L’architecture de Tadao Ando, prix Pritzker 1995, dont l’épure pose une manière singulière d’inscrire le construit dans les paysages et d’en capter la lumière, pour créer le design de lieux d’art offrant des expériences visuelles et sensorielles inédites.
À la découverte de La Commanderie de Peyrassol, de la Fondation Venet, de la Fondation Maeght, de la Fondation Hartung Bergman et de la Fondation CAB, entre Var et Alpes-Maritimes.
Le parcours artistique de David Bruce s’est déroulé sans préméditation, comme une expérience ludique où les couleurs et les formes apparaissent une manière d’entretenir un rapport insouciant à l’existence, en accueillant toutes les occasions d’exprimer les vibrations optimistes qui allègent les pesanteurs.
Découvrir l’univers de Simon Poter est un véritable enchantement car si l’artiste inscrit son œuvre dans le mouvement de l’abstraction géométrique, la rigueur formelle est déjouée par une rythmique éclatante qui nous entraîne dans un élan résolument vibrant et l’on ressent intensément toute la dimension de plaisir qui émane de la démarche de l’artiste.
Geronimo aka Jumping Bull voit la vie en noir et blanc, c’est peut-être pour cela que son existence est haute en couleurs. Une achromatopsie réduit son champ de vision aux nuances de gris, les couleurs n’existent que dans sa mémoire et pourtant le personnage est flamboyant : son parcours et son art résolument iconoclastes s’accommodent mal avec les conventions et les raisons closes qu’il s’emploie à bousculer non sans panache. Pour autant, ce serait mal connaître Geronimo que le réduire à l’esprit rock et aux lumières de la scène qui inspirent une partie majeure de son travail : en coulisses, l’artiste s’intéresse à l’envers du décor, aux invisibles et aux laissés pour compte qu’il met à l’honneur dans certaines de ses œuvres et pour qui il engage des projets caritatifs. Il faut dire que lui-même a connu à la fois la gloire et la déshérence, les écarts de route et les « on the road again » : une intensité de l’existence dans toutes ses dimensions. C’est en effet en prison, et il l’assume d’autant que la suite de son parcours lui a valu une réhabilitation, qu’il a abordé la pratique artistique pour canaliser son énergie. Au départ, des toiles, des essais de techniques et beaucoup de portraits, des toiles accrochées chez lui sans qu’il n’en assume la paternité et qui ont très vite suscité l’engouement.
Hatchikian Gallery et Quai 36, partenaires depuis 2022 pour une série d’expositions consacrées aux artistes issus de la mouvance graffiti, participent à l’édition 2023 de l’Urban Art Fair, foire internationale dédiée à l’art urbain, qui se tiendra du 13 au 16 avril sous la halle du Carreau du Temple à Paris, dans le quartier du Marais. Une 7ème édition de l’événement qui met particulièrement à l’honneur les femmes galeristes et curatrices : Audrey Hatchikian de la galerie éponyme et Julie Frydman de Quai 36 se réjouissent ainsi de figurer parmi la nouvelle génération ayant à cœur de proposer des scénographies originales pour renouveler la manière de mettre en lumière les artistes en s’émancipant des pratiques et des catégories qui ont jusqu’à présent codifié la présentation des œuvres. Fondée et présidée par Yannick Boesso, l’Urban Art Fair Paris fait une large place aux femmes : elle est dirigée par Morgane Perroy est compte Magda Danysz au sein de son comité artistique.
Si la collaboration entre Hatchikian Gallery et Quai 36 se poursuit au fil des expositions présentés depuis l’inauguration d’un partenariat en 2022, c’est par l’élan d’un enthousiasme contagieux qui réunit les équipes, les curatrices, les artistes, pour mettre en lumière des talents à découvrir à travers des scénographies origines, venues d’affinités électives entre des personnalités qui ont avant tout plaisir à travailler ensemble et partager leurs émotions artistiques.