Steph Cop inscrit sa recherche artistique en immersion dans l’écosystème du Morvan où il a installé son atelier. La sculpture est partie prenante d’un cycle vital dont l’artiste explore l’étendue.
IX, une suite ordonnée de 9 formes.
En sculptant des arbres tombés à terre, porteurs des stigmates d’une histoire mémorielle, il prolonge leur inscription dans le récit de l’Homme. IX, suite ordonnée de 9 formes – figures ARO, a constitué un mouvement majeur de l’œuvre de Steph Cop entre 2008 et 2020. Un mouvement qui s’est élaboré comme une exploration instrospective d’un rapport de l’Homme à l’arbre, une projection stylisée et épurée des multiples possibles de l’être-au-monde. Au hasard de projets artistiques, Steph Cop a rencontré le photographe Bálint Pörneczi. Il s’est demandé avec quel œil le portraitiste approcherait ses figures de ARO, personnifications de l’arbre. Car, le cycle ARO se terminant, le moment était sans doute venu d’ouvrir le face-à-face entre le je de l’artiste et la figure sculptée à un regard tiers, le moment de s’extraire du miroir anthropomorphique pour enfin pouvoir comprendre l’arbre comme une altérité, saisir le sublime de sa singularité, lui offrir une esthétique spécifique, hors de la projection de soi. L’œil du photographe aura été cette présence autre qui permet à chacun de trouver son propre lieu subjectif. Steph Cop a donc invité Bálint Pörneczi à le suivre dans ses pérégrinations en Morvan, source inspirante, à la rencontre des arbres et des sculptures, en immersion dans le cheminement artistiquE.
Bálint Pörneczi, l'œil du photographe.
Le photographe a d’abord été déstabilisé par le fait de s’attacher à un sujet statique, lui qui réalise ses portraits dans un mouvement d’échange d’où surgit l’évidence d’une pose. Il a alors abordé les sculptures comme des personnages. Ses photographies restituent l’incarnation vivante de l’arbre en créant, par le jeu de la lumière et du champ, la temporalité et la profondeur d’un récit, comme elles le font avec les visages. Bálint Pörneczi imagine l’arbre originel dans ARO, cherche ces détails dans le système des fibres qui dessinent les traits de caractère, les expressions qui lèvent le voile sur l’intériorité, racontent une histoire, un vécu avec les éléments. Il imagine la présence dans ARO pour rencontrer son mystère. Et, au-delà de l’œuvre, le photographe a restitué l’écosystème de la quête artistique, en travaillant à la manière d’un documentariste. Hors champ de la genèse de l’œuvre de Steph Cop, il a guetté les fragments de tension créatrice, les moments de grâce furtifs qu’il a saisi avec cette eustochia qu’Aristote définissait comme justesse du coup d’œil. Il a donné à entrevoir la profondeur mystérieuse de la forêt du Morvan qui inspire le sculpteur ou la gestuelle à la fois brutale et élégante qui relie la main, l’outil et la matière. Autant de fulgurances captées par l’intuition de Bálint Põrneczi, qui seront, dans ses photographies, une trace visible du cheminement invisible de la création.
Les photographies sont le kairos de l’œuvre, ce temps qui renvoie à l’intensité du ressenti présent et donne une profondeur à l’instant. Quand Steph Cop projette une part de son intériorité dans l’œuvre ARO, Bálint Põrneczi en extériorise les détails, les signes, les marques. Son objectif place la lumière sur l’impalpable, l’indicible. Le photographe a inscrit la singularité de son travail et développé sa recherche propre à travers une série intitulée « La Trace », abordée comme un éphémère qui persiste. Un regard intimiste sur la précision des traits, la peau de l’arbre photographiée à la manière de ses collections de portraits. Les fibres de l’arbre apparaissent comme les rides du visage, l’empreinte du temps qui passe, le récit de l’histoire du vivant sur la matière sculptée. Les cernes de l’arbre créent des abstractions que Bálint Põrneczi saisit alors qu’un rai de lumière vient les éclairer. À travers les photographies révélées, le sculpteur découvre des secrets qu’il n’avait pas percés. Le regard par effraction de Bálint Pörneczi dévoile une dendrochronologie artistique de la matière sculptée, l’empreinte des éphémérides intimes.
Balint Porneczi, photographe installé dans l’Aveyron, avait déjà documenté de le projet in situ de sculpture d’un Robur à Rodez. Ce travail de sculpture de Steph Cop est une belle histoire qui a pu être portée par le mécénat Hatchikian Gallery, grâce auquel un livre a été édité et offert aux passionnés du travail de l’artiste ainsi qu’à celles et ceux qui ont pu être touchés par cette sculpture monumentale d’un séquoia centenaire au centre de la cour du collège Joseph Fabre à Rodez, qui a vu grandir et jouer des générations d’enfants, témoin de tous des secrets ruthénois.. C’est toujours de la rencontre avec un arbre que naît un projet de sculpture dans l’œuvre de Steph Cop. Le séquoia de la cour du Collège Fabre à Rodez se trouvait au crépuscule de sa vitalité. C’est ainsi que Steph Cop à été sollicité pour restituer la grandeur d’un arbre emblématique de l’histoire particulière d’un lieu. Il est des arbres majestueux qui ont accompagné de leur présence la transmission générationnelle dans les villes et les villages, ou encore dans des paysages remarquables : ceux-là constituent autant de matière que l’artiste va s’attacher à sculpter, comme une manière de ne jamais refermer la page d’un livre où s’écrit un récit à la fois incarné et imaginaire : celui du temps, de la vie, de l’être-au-monde. Le projet s’est déroulé dans le cadre du siècle Soulages, célébrant le centenaire du maître de l’outrenoir originaire de la ville qui abrite un musée dédié à son œuvre. C’est la figure Robur qui va redonner sa puissance au séquoia centenaire de Rodez. Pour Steph Cop, Robur incarne en effet la force de l’arbre et les failles du temps. Dans la série ARO, recherche matricielle de l’œuvre, Robur se distingue par sa silhouette à la fois abrupte et fine. Robur est une figure tutélaire, indéfectible, un pilier. Il incarne ici l’imaginaire symbolique du séquoia pour les Indiens qui placent ce phénix indestructible comme centre de gravité du monde. Robur représente la force de la nature comme le personnage de Robur le conquérant dans le roman de Jules Verne. Les 22 jours de sculpture qu’ont nécessité ce projet ont été immortalisés par Bálint Pörneczi et le livre consacré à l’Arbre de Rodez financé par Hatchikian Gallery associé le journal tenu par l’artiste chaque jour et les photographies de l’avancée du travail de création. 22 jours de sculpture dans l’enceinte du collège vont transformer l’arbre fatigué en œuvre intemporelle et mémorielle. Steph Cop découvre d’abord le séquoia, sa matière-chair intime qui porte les traces de sa biographie. 22 jours de sculpture vont donner à l’arbre la figure ARO qui va lui conférer une existence personnifiée. Robur se distingue par sa silhouette à la fois abrupte et fine, incarnant la force de l’arbre et révélant les failles qui témoignent de sa longue vie aux prises avec les humeurs des Hommes, de la terre et des vents. C’est ainsi que l’art a pu prolonger la belle histoire mémorielle du séquoia centenaire, à travers la majesté de Robur 4400, sculpture monumentale exposée à Rodez durant l’année 2019, année du Siècle Soulages, avec le concours de Hatchikian Gallery, et sur proposition de l’artothèque de Rodez, de Christophe Lauras principal du collège Fabre et de Julien Tenes, professeur d’arts plastiques. Steph Cop a sollicité le photographe local Bálint Pörneczi pour documenté le projet et donner un regard en coulisses de la genèse d’une sculpture.
Steph Cop et Bálint Pörneczi ont poursuivi leur collaboration pour le livre IX Arbre et en épilogue de ce travail en miroir qui a constitué la substance du livre consacré au mouvement IX dans l’œuvre du sculpteur, ponctué de photographies et de textes qui lèvent un voile, entre ombres et lumières, sur l’écosystème artistique de Steph Cop, tous deux ont co-signé une sérigraphie, ARO.ÁBRÁZAT, à découvrir parmi les œuvres proposées par Hatchikian Gallery.
Découvrez le livre de Steph Cop & Bálint Pörneczi ainsi que la sérigraphie ARO ÁBRÁZAT, 2020.