Si Pablo Zabala s’est initié très jeune au dessin et à la peinture avant de donner libre cours de façon autodidacte à son langage visuel en espace public avec la réalisation de graffitis et fresques rapidement remarqués, son intérêt pour la pratique artistique l’a conduit a étudier les Beaux-Arts à Bilbao. En effet, de son point de vue, un artiste accompli doit se confronter humblement aux grands maîtres qui ont marqué l’Histoire et apprendre à maîtriser les techniques de la peinture classique, pour mieux cheminer en affirmant sa propre singularité. Il en va de l’inscription dans le monde commun artistique qui nous précède, qu’il s’agisse l’accueillir comme référence ou de proposer une démarche en rupture. Se distinguer, construire son identité artistique, ne signifie pas faire table rase du passé ou dénigrer l’histoire : laissons aux nihilistes l’illusion de leurs égos prométhéens.
Une formation à la technique picturale aux beaux-arts de Bilbao.
Pendant ces années de formation aux beaux-arts, Zabala dissocie son attrait pour l’intervention murale et l’évolution de ses créations sur toile, le geste fulgurant et la représentation classique réaliste. Ce n’est qu’après avoir progressé suffisamment durant ce patient cursus d’apprentissage pour se sentir fondé à affirmer sa légitimité d’artiste que Zabala va pouvoir tisser des liens plus étroits entre la pratique murale et le travail en atelier, qui vont ainsi se nourrir mutuellement de leurs énergies spécifiques. Le réalisme est la ligne directrice du travail de Zabala et sa recherche se cristallise sur le trait et la couleur, la relation entre les deux constituant la grammaire esthétique originale de chaque artiste. Zabala explore des nuances chromatiques, en développant une colorimétrie souvent froide, avec une prédilection pour les jeux de complémentarité autour des bleus.
Un artiste muraliste inspiré par le magnétisme des lieux.
Une obsession commune à tous les artistes urbains n’épargne pas Zabala : la quête permanente de lieux abandonnés, abrupts, marqués des traces d’un récit, remarquables par les perspectives qu’ils offrent, par les horizons qui les prolongent, par leur magnétisme insaisissable, autant de lieux en transition que l’art va pouvoir ré-enchanter en proposant une narration picturale in situ. Zabala déploie ses fresques sur des murs qu’il a repéré au cours de ses déambulations, et son talent lui vaut aussi de nombreuses commandes institutionnelles d’intervention. L’empreinte historique des lieux l’intéresse et inspire son inscription et son positionnement de muraliste, avec un sentiment de responsabilité lorsqu’il s’agit d’investir un site. Il peut s’agir d’un pont de Biscaye, d’un site classé au patrimoine de l’Unesco, ou encore d’une montagne emblématique des îles Canaries, site dans lequel Zabala a réalisé une œuvre murale monumentale, qui s’insère dans un lieu que les anciens décrivaient comme une montagne magique, un temple naturel où les jeux d’ombres des reliefs s’apparentaient à une horloge astronomique témoin des cycles du temps qui passe. Zabala a introduit l’élément eau dans la perspective de ce paysage rocheux mythique. L’artiste participe régulièrement à des festivals d’art urbain pour lesquels sa présence est sollicitée, et réalise parfois des fresques à plusieurs mains avec d’autres muralistes, des créations dans l’échange qui l’enthousiasment beaucoup pour la part imprévisible qui en animent la genèse.
Zabala rejoint les artistes intervenant avec Quai 36.
C’est par son rayonnement en tant que muraliste que Zabala a été repéré par la maison de production d’art Quai 36 pour faire partie de son réseau d’intervenants. En effet, Quai 36 fédère artistes français et internationaux, collectivités et élus, animés par la certitude que l’art participe pleinement des nouveaux enjeux d’urbanisme. Les artistes sont alors investis dans différents projets pour déployer des propositions esthétiques inédites en lien avec le vivre-ensemble dans le paysage urbain contemporain, avec pour objectif de ré-enchanter le quotidien des usagers et riverains et d’introduire l’art par effraction à travers l’installation d’œuvres éphémères ou pérennes, manière de transmettre une expérience culturelle au plus grand nombre. Un premier projet de collaboration inaugurale entre Zabala et Quai 36 pour une fresque dans une ville française en pointe des festivités événementielles se dessine pour le printemps 2023, projet à suivre donc au fil de son dévoilement.
Une inspiration venue de l’environnement océanique du pays basque espagnol.
Zabala a grandi dans la région de Viscaya (Biscaye) au Pays basque espagnol, dans une province marquée par une histoire minière et industrielle, mais aussi riche de paysages à la fois rocheux et maritime, un décor tout en contrastes entre les éléments et une architecture abrupte, d’un univers colorimétrique qui a particulièrement inspiré sa démarche artistique. Entre l’emblématique ville de Guernica et la contemporaine Bilbao, les sources d’inspiration associant l’histoire et l’art ne manquent pas pour Zabala. La côte océanique est un lieu ressource pour l’artiste qui ne se lasse pas d’observer le mouvement de l’eau qui se heurte aux rochers, les variations de couleurs selon le climat, les changements de lumière au fil du jour… L’eau va s’imposer comme un thème central dans l’œuvre de Zabala, qui représente cet élément souvent en gros plan sur des murs qui semblent entrouvrir une fenêtre sur les horizons marins infinis. C’est un thème que l’artiste explore également dans son travail sur toile avec des séries d’études, les Sea Painting, eau et roches, où les lignes du mouvement et les nuances de bleus sont marqués de l’énergie d’un réalisme saisissant, à la fois onirique, mystérieux, inquiétant ou apaisant selon le regard que chacun porte sur l’œuvre.
ROCA 4, 2022
Huile sur toile de lin
Œuvre unique, signée
H89 x L130 cm
Le mouvement de l’eau, élément central de l’œuvre de Zabala.
Pablo Zabala pratique le surf chaque jour comme une rencontre avec ce mouvement de l’eau. Il éprouve la topologie des vagues, leur cinétique, qu’il cherche à retranscrire dans ses développements picturaux avec cette importance du trait qui délimite les nuances chromatiques. L’artiste parcourt les paysages inspirants : il utilise beaucoup la photographie pour saisir des formes, des lumières qui vont nourrir sa technique picturale. Sa pratique évolue cependant au fur et à mesure que son identité s’affirme : alors qu’il cherchait à représenter une vision saisie au vol par l’objectif, perfectionnant son approche réaliste, il s’émancipe aujourd’hui de plus en plus pour laisser libre cours à des compositions imaginaires mais toujours d’apparence réaliste. Oublier l’image pour mieux la recréer.
ROCA GRIS / AZUL 1, 2022
Huile sur toile de coton
Œuvre unique, signée
H61 x L46 cm
ROCA GRIS / AZUL 2, 2022
Huile sur papier
Œuvre unique, signée
H60 x L45 cm
Le réalisme dans toutes ses dimensions.
D’autres sujets abordés par Pablo Zabala, toujours dans la ligne directrice du réalisme, s’inscrivent dans la figuration. Les thématiques sont pour lui un prétexte à une recherche technique qu’il n’a de cesse d’aboutir et de renouveler. On trouve ainsi dans l’œuvre de Zabala des personnages mis en scène, le plus souvent dans leur relation à la nature environnante, aux prises avec le mouvement vital, ou dans un corps à corps avec les éléments. Sont représentés en plan serré des personnages contemporains ou des figures archétypiques d’une époque plus ancienne.
Une recherche chromatique nourrie par la pratique murale et le travail en atelier.
Les œuvres de Zabala sont saisissantes par leur atmosphère chromatique, le travail sur la couleur est central. Il en émane une énergie toute particulière. Sur les murs, Zabala peint d’un geste rapide, et si le travail en atelier lui offre la possibilité d’une temporalité créative plus étirée, l’acte sur toile reste toutefois inscrit dans cette fulgurance qui permet de conserver la part de spontanéité et d’imprévisible qui va révéler cette vérité de l’œuvre. Ses réalisations murales restent ainsi une ressource de vitalité pour la toile. En décembre 2022, avant l’ouverture du group show Projections où son travail sera présenté aux côtés de celui de Nelio et Chazme dans le cadre d’une nouvelle collaboration entre Hatchikian Gallery et Quai 36, Zabala est commissionné pour la réalisation d’une fresque en Galice, qui révélera une évocation de la forêt, l’occasion pour lui de s’intéresser aux couleurs, aux mystères, aux perspectives d’un univers naturel chargé des récits et mythes que les hommes ont pu y projeter depuis toujours.
VERDE / OCRE 1, 2022
Acrylique et huile sur toile de lin
Œuvre unique, signée
H70 x L66 cm
AZUL 2, 2022
Acrylique et huile sur toile del in
Œuvre unique, signée
H70 x L66 cm
Zabala aux côtés de Chazme et Nelio pour le group show Projections présenté par Hatchikian Gallery et Quai 36.
L’exposition Projections qui mettra en regard l’œuvre de trois artistes travaillant à la fois sur murs étoiles, trois artistes s’imposant comme de remarquables coloristes, sera pour Zabala l’occasion de prendre un temps de création spécifique pour explorer d’autres orientations dans sa démarche en atelier. Le réalisme reste bien sur le fil conducteur de l’œuvre sur les différents supports, mais l’artiste s’oriente aussi vers l’abstraction à partir de gros plans et de composition macroscopiques, ou à travers la stylisation de figures éprouvée dans ses essais techniques.
Lorsque Hatchikian Gallery et Quai 36 ont proposé à Zabala de faire partie du group show Projections, ce dernier s’est montré particulièrement enthousiaste et a trouvé le projet stimulant, Nelio et Chazme étant pour lui des références incontournables et importantes pour situer son propre travail. L’idée de confronter leurs démarches , à la fois dans ce qui les relie et les singularise, lui a insuffler un élan créateur qui, sans aucun doute, transparaîtra dans les œuvres qu’il prépare pour cette exposition.
