C’est un langage visuel très singulier que déploie Remed à travers une œuvre résolument solaire et chaleureuse : une manière de célébrer la vie, l’amour, et de transcrire dans l’art ce qui nous transcende et nous relie. Un langage artistique universel qui réunit l’émotion esthétique, les lois de la science, la mathesis et la dimension symbolique, pour une cosmogonie où les formes, les lignes et les couleurs tissent ces mythes et paraboles fondateurs des civilisations qui mettent en récit les spécificités de la condition humaine.
Une harmonie entre figuration et abstraction
L’harmonie graphique qui émane des œuvres de Remed synthétise figuration et abstraction. Les compositions stylisées s’offrent comme des mosaïques qui ouvrent tous les possibles de la narration. La simplicité n’est qu’apparente : Remed honore la pluralité, la dualité, la diversité, cherche le tout dans le un et ce qui relie l’un au tout, dans un dialogue inépuisable et un questionnement jamais refermé. Les trois couleurs primaires sont très présentes et structurent les formes entre contrastes et complémentarités, jouant une dialectique du plein et du vide dans des figures à portée mythologique. Remed procède par aplats de couleurs, un style de « peinture plate » qui restitue les volumes par les motifs, les effets d’ombrage et de juxtaposition des tons dans des représentations graphiques. Les courbes se cachent dans les lignes, les volumes dans les plats, les pleins dans les vides. Le mouvement est provoqué par la tension du trait et le contraste des aplats. L’artifice des couleurs est rendu par l’acrylique, dont les propriétés de couvrance offrent un matériau privilégié pour cette technique de peinture plate qui marque l’art urbain mais qui a pu, auparavant, constituer une rupture en atelier.
L’influence du zellige
L’amplitude esthétique des récits visuels que Remed élabore dans ses compositions mosaïques trouve son inspiration dans l’art du zellige, les figures égyptiennes ou l’architecture mauresque. Une recherche de l’harmonie des formes et couleurs, de la synchronie géométrique et symbolique. L’œuvre de Remed est universelle, elle s’adresse à tous sans distinction de langue ou de culture. Il émane de ses toiles à la fois une énergie solaire et un sentiment de quiétude. La force de l’abstraction géométrique crée une unité dans la multiplicité, et se présente comme un ordre harmonieux et méditatif.
Un propos artistique tourné vers la rencontre
La découverte du Maroc a été une révélation dans le parcours de l’artiste, Guillaume Alby, né à Lille en 1978, désormais installé en Espagne. Diplômé d’une école de communication et de design graphique, il a tracé son propre chemin, encouragé par une rencontre impromptue avec l’artiste Mahjoub Ben Bella, dont l’œuvre abstraite, colorée et inspirée de la calligraphie arabe rayonne dans l’univers de Remed. Guillaume Alby a enseigné le graffiti dans les écoles et institutions sociales, ainsi qu’au Children Art Museum de New York. S’il travaille en atelier, Remed n’a pas renoncé pour autant à investir l’espace public, où la fulgurance du geste artistique est aussi une manière spontanée de faire lien à l’Autre. Messages calligraphiés sur les murs, collages, fresques murales monumentales, sont pour lui autant de supports pour ouvrir le dialogue, susciter des rencontres : l’art est une façon d’être-au-monde, de vivre et de vibrer ensemble. Remed, grand voyageur, a réalisé des œuvres murales, en peinture ou céramique, dans nombre de grandes villes du monde : Madrid, Londres, New York, Atlanta, Miami, Memphis, Johannesburg, Séville, Kiev, Belgrade et des villes du Brésil, pays où il s’est quelque temps installé. À chaque fois, l’artiste crée in situ, en interaction avec le lieu, en s’imprégnant des cultures pour élaborer un signifiant cosmopolite. L’œuvre éclatante et universelle de Remed est un véritable antidote au repli sur soi, un sésame précieux pour dépasser les ségrégations.
La simplification, une sincérité dans l’adresse à tous
« Je vis ce que je ressens, je pense que je vis » : Remed peint « comme on écrit un journal intime quotidien ». L’art est la langue des émotions, une manière de s’adresser à l’autre et de faire communauté. Au fil du temps, son œuvre s’est affirmée et singularisée dans une démarche de simplification qui lui donne une densité vibrante et rayonnante. Cette simplification tend vers un langage visuel que l’artiste souhaite accessible à tous. La ligne et la courbe structurent l’œuvre, qu’il s’agisse de dessins, de peintures, ou de sculptures. La courbe est ce lien entre abstraction et figuration ; elle permet de styliser les figures. Si Remed revendique une culture artistique autodidacte, Léger, Matisse, Modigliani, Klimt ou Mirò parcourent le déploiement de son œuvre de leurs influences souterraines.
Remed a pour vocation de « créer des royaumes intemporels qui gardent la mémoire des racines communes », des œuvres où chacun peut trouver refuge. Les couleurs franches et vives, les formes pures, les motifs géométriques sont pour l’artiste une forme de sincérité pour atteindre une vérité universelle et une forme de sagesse.
L’Homme et le Ciel
Hatchikian Gallery présente L’Homme et le Ciel, 2020, acrylique sur toile, 129x88cm, œuvre unique signée de Remed. On retrouve la stylistique géométrique qui marque la singularité de l’artiste, les formes en mosaïques de couleurs méridionales et les courbes qui soulignent la thématique qui anime le propos artistique : le dialogue du singulier à l’universel, la place de chacun dans un monde commun. Un rapport au monde porté par une dimension spirituelle qui pour l’artiste n’a rien de religieux mais où l’infiniment grand est l’espace des rencontres et de l’accueil de l’Autre. Remed parle d’un quête d’ « attitudes » dans ses créations : « Je recherche la vibration des corps ». Des compositions où les segments s’entremêlent et vibrent de leur confrontation, où l’on retrouve ces aplats de couleurs qui tracent une identité plurielle et multiforme. Pour Remed, la géométrie est en résonance avec la structure du monde. La connexion entre la terre est le ciel est une interrogation récurrente dans sa représentation de l’Homme, qui s’ouvre au tout et s’inscrit dans l’univers à partir de racines communes.
Acrylique sur toile
129 x 88 cm
Œuvre unique, signée